petit précis de bonnes manières culinaires

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Quand j'étais petite, plusieurs injonctions rythmaient les repas - en général des diners, cantine oblige, mais pas seulement. Petit florilège de celles que j'ai retenues, et des autres.
 
D'abord, bien sûr, de la bonne tenue à table.
- "On ferme la bouche quand on mange" : avoir pu admirer en détail le travail masticatoire d'Harold m'a définitivement vaccinée de faire le contraire, malgré son argument du "Mais c'est parce qu'on sent mieux le goût comme ça" - oui, moi aussi je le sens bien le goût, et pourtant je suis à un bon mètre de son origine...
- "On ne parle pas la bouche pleine" : c'est vrai que c'est quand même pas pratique.
- "On attend que tout le monde soit servi pour commencer à manger" : suis d'accord, sauf pour les pâtes, ça refroidit trop vite.
- "On se tient droit quand on mange" et "On ne met pas les coudes sur la table" : ont fait long feu, mais je déteste manger à une table basse, tassée sur mon assiette.
- "Arrête de parler, et mange" : toujours d'actualité...
 
Ensuite, du respect de la nourriture.
- "Prends ton couteau pour pousser" : j'évite de le faire avec les doigts, c'est vrai. A un moment j'avais adopté la technique de mon grand-père pour saucer : il plantait un bout de pain au bout de sa fourchette, et je trouvais ça trop classe. Après, mon naturel de bonne vivante mal élevée a repris le dessus, et depuis, je lèche l'assiette. Ce qui ne m'empêche pas d'admirer la dextérité d'André, capable de traquer le moindre grain de riz et la moindre goutte de sauce juste avec sa fourchette.
- "Finis ton assiette, il y a des gens qui meurent de faim" : jamais bien compris le rapport, à moins de leur envoyer mes restes par colissimo. Ca m'a fait prendre cinq kilos à la cantine en ébenisterie, parce que les portions étaient trop copieuses. Maintenant, je le fais à la chinoise : s'il en reste dans mon assiette, c'est que j'ai bien (assez) mangé.
- "Mange ta viande" : on a beau croire qu'on est discrète, les parents voient bien près de quelle chaise traine le chat... Avant j'aimais la semelle, maintenant je snobe le tartare du resto s'il est servi pré-assaisonné, comme quoi, en matière de bouffe, rien n'est joué avant trente ans.
 
Après, il y avait les petites particularités propres à la famille, ce qu'on découvre comme idiotique en allant chez les autres. Par exemple, du côté de mon père, outre une éducation un peu rigide sur les bonnes manières (ma mère m'avouait récemment qu'elle trouvait que deux ans c'était un peu tôt pour commencer l'apprentissage...), eh bien, on mange séparemment la viande et les légumes. Bon, sauf quand c'est un plat en sauce, faut pas déconner. Moi j'y ai toujours trouvé un côté pratique : ça évite de faire valser les petits pois quand le couteau ripe sur une entrecôte un peu nerveuse. Mais apparemment, y en a, ça les choque - Harold, encore lui, était assez moqueur. Depuis, ceci dit, j'ai vu pire, j'ai vu Hélène et Lise :).
Il y a aussi la question de la répartition des portions dans les assiettes. J'ai toujours trouvé normal qu'on ait la même chose tous les trois (Romain, Aurore et moi), et que les parents, plus grands, aient un peu plus. Mais Romain m'a parlé récemment d'un pote à lui, famille nombreuse aussi, un peu plus que la nôtre, même, où là en revanche, c'était la guerre ! Fallait arriver le premier au plat pour être sûr d'en avoir, et tant pis pour les trainards...
 
Pour en revenir aux injonctions, vous avez peut-être remarqué qu'il en manque deux, cruciales, dans ma liste. C'est parce que c'est celles auxquelles j'ai très très vite, à l'âge adulte, totalement contrevenu. Il s'agit bien sûr de "On ne mange pas avec les doigts" et de "On ne joue pas avec la nourriture". Je m'insurge !!! Hier soir j'ai refait les petits feuilletés champignons-fourme, avec la pate Tupper faute de feuilles de bricks et suite à une suggestion d'André, et bien qu'il m'ait fallu environ quatre fois plus de temps pour les préparer que pour les engloutir, ça vallait le coup. D'abord parce qu'en plus d'être bons, ils étaient tout kawai (y a que la moitié de l'assiette parce que l'autre était déjà saccagée), et ensuite parce qu'on a bien bu rigolé :). Donc, merci à mes parents de m'avoir appris à bien me tenir en société et de m'avoir transmis une idée de la cuisine simple, créative et épicée, et vive la finger-food :)
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